25 September 2008
J'étouffe. Il faudra bien qu'ils comprennent. Je ne peux plus jouer éternellement la comédie. C'est fini, c'est triste, mais c'est fini. Tout ça ne m'amuse plus. Ça ne m'a jamais vraiment amusé. C'est apparemment à moi de précipiter les choses sinon je serai encore ici dans dix ans à ne pas savoir. Si ça en vaut la peine. Comment c'est. Comment ça peut être. Je vais y aller.
22 September 2008
Journal de celui qui est parti – 10
19 September 2008
Journal de celui qui est parti – 9
16 September 2008
Journal de celui qui est parti – 8
Je n'ai encore rien fait. Les choix restent les mêmes. Les journées se suivent et je suis encore porté par l'euphorie de la nouveauté. Et le sourire d'H. En soi, c'est déjà un grand changement par rapport à mes activités d'avant. Mais l'oisiveté ne me pèse pas. Même si j'ai plus de temps pour réfléchir, pour penser à tout ça. C'est aussi plus de temps pour culpabiliser. Mais bizarrement, je n'arrive pas à culpabiliser. Ça viendra certainement plus tard, quand la routine s'installera et que je pourrai vraiment comparer avec la vie que j'ai quittée. La routine avec H. est-elle meilleure qu'avec C. Je ne suis pas pressé de le savoir, elle sera forcément différente. Et peut-être que nous ne la laisserons pas s'installer, nous remettrons sans cesse tout en jeu, ne tiendrons pas en place, irons toujours plus loin. Je crois que nous en sommes capables, tous les deux. Nous savons ce que nous avons quitté, nous savons ce qu'il ne faut plus faire. Mais nous n'en sommes pas encore là. H. est derrière moi, lit par dessus mon épaule. Je serais toi, je m'embrasserais, dit-elle.
11 September 2008
Journal de celui qui est parti – 7
10 September 2008
Journal de celui qui est parti – 6
09 September 2008
Journal de celui qui est parti – 5
08 September 2008
Journal de celui qui est parti – avant le départ
07 September 2008
Journal de celui qui est parti – 4
05 September 2008
Journal de celui qui est parti – 3
Cette nuit, j'ai bien failli. Les rappeler, tous. L'un après l'autre. D'abord C. bien sûr puis B. et L. Et les autres ensuite. Les appeler et juste leur dire. Mon adresse. Et puis viens. Viens me voir. Et raccrocher juste après. Attendre ensuite. Lequel viendrait le premier. Lequel réussirait à me rejoindre le plus rapidement, par la route, le train, les airs… Le plus rapide ne pourrait pas être là avant le matin. Je n'aurais pas pu me rendormir. J'aurais attendu. Et toute la journée ensuite, s'il le fallait. Et peut-être encore deux jours. C. serait venue, elle aurait mis du temps mais elle serait venue. Elle aurait été sûrement surprise de me trouver ici. Plutôt bien. Jusqu'à cette nuit. Elle n'aurait rien dit. M'aurait juste serré très fort. Elle aurait sûrement pleuré. Moi aussi. Je ne l'ai pas fait. J'ai réussi à me retenir. Je ne suis pas descendu téléphoner. Je suis resté dans ma chambre. H. dormait à côté de moi, sa tête tournée vers moi, un petit rictus dans son sommeil, je l'ai embrassée, me suis lové contre elle, elle n'a pas bougé. J'ai attendu. Je comptais les battements de mon sang dans mes tempes, je pensais que le bruit allait la réveiller. Plus j'étouffais, plus je me serrais contre elle. Elle dormait bien, rayonnante de notre bonheur. Ma nouvelle vie. Celle que j'ai vraiment choisie. Je n'ai pas vraiment pu me rendormir, j'ai calé ma respiration sur la sienne, elle a bougé quand j'ai embrassé ses cheveux, elle s'est tournée et j'ai continué à penser. Si je les rappelais, qui viendrait. Quand viendrait C. Que penserait-elle de me voir ainsi, ici. Je pourrais le lui écrire. Mais je me le suis interdit. Depuis le début. J'ai dû sombrer sur le matin, il faisait déjà clair. J'ai dormi profondément, comme épuisé par cette nuit. H. m'a réveillé tout doucement, m'a dit quelque chose que je n'ai pas compris. Son regard dans la lumière du matin, le soleil si cru, j'ai bien fait. Avant que j'aie pu lui dire bonjour, elle me ferme la bouche d'un baiser, comme elle seule en a le secret.
04 September 2008
Journal de celui qui est parti – 2
03 September 2008
Journal de celui qui est parti – 1
La photographie ? J'y pensais justement. Oui, c'est étrange mais elles partagent toutes cette même passion. C'est un hasard si j'aime systématiquement une femme qui pratique la photographie. Pour le plaisir. Je n'en ai pas connu de professionnelle, enfin pas au sens où on l'entend, mais si je pense à C. ou même N., chacune à sa façon était photographe. M. aussi bien sûr. Chacune avec son propre style. Quand je serai bien vieux, reclus dans mon alcôve, j'exposerai ma dépouille au milieu des portraits encadrés réalisés par celles qui m'ont aimé. On me verra adolescent, cliché mal fixé au club photo du lycée, rayonnant dans l'ivresse du premier amour, magnifié ensuite par celle qui m'a le plus aimé et transformé enfin par la tendresse du regard derrière l'objectif. Et toi aussi, alors, tu photographies. Ton portrait sera là aussi si tu le réalises un jour, si je pose pour toi, si tout cela débouche sur quelque chose… en même temps, je n'en doute pas. Ce sera peut-être le plus surprenant dans cette exposition. Celui que personne ne soupçonne et je ne pourrai que t'offrir un visage serein, où le bonheur affleure. Un visage que personne n'a jamais vu. Pas même moi. Peu importe quels seront les prochains, qui seront les prochaines, c'est ce portrait qu'il faudra mettre juste au-dessus de moi, quand les quelques amis qui m'auront survécu viendront me voir une dernière fois. Je ne sais pas si toi, tu seras là, à ce moment-là, si tu m'auras suivi jusque là, si tu te souviendras encore de moi, mais tous devront me voir tel que tu m'as fait, en cet instant. La photographie ? Intéressant. J'avais oublié de te répondre. Je ne veux pas te dire, je ne peux pas te dire que les autres avant toi, aussi… j'aimerais que tu sois la première, que tu prennes ton appareil d'une main, que tu tendes le bras le plus loin de nous et que tu retournes l'objectif sur nous, pour immortaliser ce que nous sommes en train de vivre, pour que tout le monde le sache. Même si personne ne voit la photo. Même si personne ne nous voit. D'autres ont fait le geste avant toi. Mais toi, tu dois le faire, pour nous. pour que commence vraiment l'histoire. pour nous documenter. Au lieu de ça, tu fourrages dans ton sac, tu sors un briquet et te lèves. Tu m'embrasses rapidement. Tu reviens, dis-tu. L'appareil est là sur la banquette à côté de moi, tu n'y as pas touché. Je pourrais le prendre et réaliser seul cet autoportrait comme une surprise pour plus tard. Je n'en fais rien. Non, j'ouvre l'arrière de l'appareil, sors le film juste amorcé et le range dans une poche de ton sac. Je n'attends pas que tu ais fini et sors par l'arrière du café.