meinetwegen

tentative de rattrapage, espace d'exploration, d'échange et d'expérimentation, tout par la langue, rien que la langue, slurp.

23 März 2007

Il avait dit qu'il reviendrait


Il l'avait dit. Qu'il reviendrait. Oui, mais quand. Il était assis là, à cette même place où tu es en ce moment, il parlait beaucoup, je ne l'écoutais que d'une oreille tant le brouhaha environnant me distrayait. J'aurais sûrement été plus attentif si j'avais su que ce qu'il disait, pour une fois, c'était important. C. l'écoutait très attentivement, en revanche. Elle semblait de plus en plus préoccupée par ce qu'il racontait, dans un débit de parole toujours ininterrompu. Je regardais C. les oreilles dans le vague, les yeux monopolisés par le profil qu'elle m'offrait. Je ne percevais plus que quelques bribes de ce que lui continuait à dire. Bien sûr, je m'en suis voulu, dès le lendemain, dès les premiers mots de C. au téléphone. Elle était surprise que je ne l'aie pas compris la veille, que je ne me sois pas plus mouillé pour le convaincre, que je sois parti si soudainement en leur lançant juste un "au revoir" muet des deux mains. Je suis mal placé pour en parler, vu que je n'ai pas eu tous les éléments de la conversation ce soir là. Mais C. a essayé de tout me restituer après, quand on a essayé de comprendre. Et, ne le prends pas mal, à ce moment-même, j'étais plus intéressé par le visage de C., sa bouche qui bougeait, que par le récit qu'elle me faisait de ce qu'il avait dit, comme si, même interprétés par une autre personne, et en l'occurence, la personne qui comptait le plus pour moi, ses propos ne parvenaient pas à retenir mon attention. Je m'en veux aujourd'hui. Parce que C. l'a compris, très vite, parce qu'elle a pris sa défense, à juste titre, c'est sûr. Il avait expliqué qu'il avait besoin de disparaître. Un besoin irrépressible de ne plus être avec nous sans pour autant mourir. Il avait parlé de parenthèse, de vie suspendue, de fuite, de nouvelle naissance, tous ces mots que j'avais à peine discernés dans l'atmosphère bruyante de cette soirée. Il voulait pouvoir nous manquer. Savoir qu'on penserait à lui en regrettant son absence. Pour toutes les fois où on ne lui avait pas fait sentir qu'on appréciait sa présence. Je me suis senti directement visé quand C. m'a répété cela. Surtout à cause de mon comportement pendant toute cette soirée. Si je l'avais écouté, je l'aurais pris dans mes bras, j'aurais plaisanté, je lui aurais répété combien il compte pour nous, même s'il nous noie dans les méandres de sa parole diluvienne. Mais ce message, je ne l'ai compris qu'après, je m'étais planté sur toute la ligne. Heureusement, il avait aussitôt dit à C. qu'il reviendrait. Ce qui m'enlevait un peu la culpabilité de l'apprendre pendu au fond de sa chambre sans avoir rien pu faire. C. ne m'en a pas voulu pour ce qu'il avait dit, elle se sentait aussi visée par cette décision, non, elle m'en a voulu de ne pas chercher à le retrouver. Moi, j'étais confiant, il avait besoin de recul, de faire le point, j'essayais de ne pas trop me poser de questions, puisqu'il reviendrait. Elle, elle pensait que c'était justement à nous de lui prouver qu'on était toujours là et qu'on ne le laisserait pas tomber, pour rien au monde. Elle avait dit ces quatre derniers mots avec une pointe d'accent étrange qui m'avait presque fait flancher. C'est là que j'ai compris que si j'entreprenais quoi que ce soit, je ne l'aurais pas fait pour lui mais pour C., pour cette moue accusatrice qu'elle m'affichait maintenant. J'aurais été malhonnête. Envers lui. Et aussi un peu envers elle. Ils reviendront, c'est sûr. Peut-être pas en même temps. Elle reviendra peut-être la première, découragée ou bredouille. Lui reviendra, tôt ou tard, il l'a dit, et même si je ne l'ai pas écouté, sa parole est une promesse.

02 März 2007

it's my only line for today



En hommage à la mise en scène de Maître pour "Shopping & Fucking"...