meinetwegen

tentative de rattrapage, espace d'exploration, d'échange et d'expérimentation, tout par la langue, rien que la langue, slurp.

09 Oktober 2014

presque

Ça y est, tu y es presque. Si si, retourne-toi. Voilà. Ouvre les yeux. Tu y es presque. Refais le bilan vite fait. Tu verras.
Tu as tout repris en mains. Les touches du piano te rappellent le chemin parcouru. Tu as tout laissé derrière toi. Presque tout. Nouvelle mue, vieilles peaux. Débarrassé les oripeaux. Tes doigts parcourent les touches. Avec le même plaisir que si c'était sa peau. Presque. Seule la mélodie change. Tu pianotes, tu caresses, tu repenses à tout ce que tu viens de laisser. À tout ce qui t'attend encore. Une chance que tu aimes les surprises. Un jour, tu comprendras.
Tes doigts parcourent les touches. Tout réfléchi, tu préfèrerais sa peau. Plus douce que l'ivoire. Plus tendre que ce do. En tout cas, tu souris. Puisque ça y est. Tu sors de l'erreur. La lumière au bout du labyrinthe. Bravo, et tout ça sans fil. Mais tu l'as plutôt bien mérité. Alors, pianote, caresse, touches et peau, souris-leur.

08 Oktober 2014

l'héritière

L'argent ne fait pas le bonheur.

Tu as peur. Peur de ce que tu ne connais pas. Peur. Paralysie. Blocages. Tu as des problèmes, veux des solutions. Tout doit bien pouvoir se contrôler. Presque tout. Même ton coeur. Tu y arrives très bien. Tu ne connais rien d'autre que le contrôle. Les défis toujours dans le contrôle. Toi seule maitresse de ton destin. Maitresse plutôt que femme. 
Tu aspires à ce que tu ne veux pas. Tu donnerais tout pour ça. Jusqu'à ce que tu l'ais. Au fond de toi tu voudrais juste être comme tous les autres. 
Mais non, il n'y a que toi. 
Toi pour être toi. Personne sur qui compter. Tu n'auras toujours que toi. C'est ce qu'on t'a dit. 
Ce que tu as appris. 
Vivre avec toi c'est suffisamment difficile. C'est toi qui l'as dit. 
Tu te poses problème. Tu cherches les solutions. Tu les trouves toujours. Tu vas mieux. Tant qu'il n'y a que toi ça va. Ça tu connais. Tu sens venir les symptômes. Tu les identifies. 
La vie c'est un long diagnostic jusqu'à ce qu'on ne soit plus en état de le faire soi-même juste avant de mourir. D'ici là, que toi. 
Tu es une machine. Tu ne vis pas, tu fonctionnes. C'est toi qui le dis. Ça n'engage que toi mais c'est toi qui t'engages, toi qui fonctionnes. Qui dois fonctionner.
Chaque problème a sa solution. Chaque solution t'aide à fonctionner. 
Pauvre petite fille riche. 
Au fond tu voudrais juste vivre normalement comme les autres, alors tu rejettes la normalité. 
Tu n'y crois pas. Tu ne peux pas y croire, c'est normal. Rien de ce que tu as connu n'était vraiment normal. Tu le sais , tu n'es que le produit, ce produit d'une génération qui a échoué. Tu as été faite à cette image. 
Que toi.
L'argent fera le reste. On peut tout se permettre. 
Le mensonge. Tu le sais et ça te fait souffrir. Si tu pouvais décider du début, tu changerais tout. 
Une famille comme les autres. Un père, une mère. Des frères et soeurs ? Pas forcément. Il n'y aura que toi au bout. La solitude te convient. Tu fonctionnes. Des parents qui t'aiment. 
L'amour est un dysfonctionnement. 
Ce que tu ne peux pas te permettre. Ne pas prendre de risque. Comment savoir si on aime, si on peut aimer ce qu'on ne connait pas. Mais aimer, c'est ne plus penser à soi. Impossible.
Tu peux te passer d'aimer, tellement tu veux être aimée. 
Trop de problèmes dont tu ignores les solutions. Partager des sentiments. Tu ne partages pas. Tu prends tout et tu verras bien si tu peux donner. A ton tour. Pas avant douze mois. Avant tu ne peux pas. Tu ne connais pas. Tu risquerais de te tromper. Tu as ta fierté. On te l'a inculquée. Plus que l'amour. Pas besoin des autres. Tu dois fonctionner toute seule. Pour ne pas être déçue. Tu t'y tiens. 
Au fond tu voudrais être amoureuse, vivre le grand amour, comme d'autres mais ce serait renoncer à être différente jusqu'au bout. Mais au foncd c'est ce que tu voudrais. Tellement que ça fait mal. Tu ne comprends pas pourquoi ça fait si mal.Alors tu pleures. Comme une enfant. Ce que tu n'as jamais été. On t'a privé d'enfance. Tu devais fonctionner. Une trop grande charge sur tes épaules. Depuis le début. Toi qui ne comptes que sur toi, tu dois répondre des autres. 
Tu es une héritière.
A défaut d'avoir été une enfant. 
Tout était là. Tu ne devrais pas te soucier. Mais il manquait l'essentiel. Un père qui te prenne sur ses genoux. Qui te chatouille. Qui te fasse des bisous dans le cou. 
Tout le reste tu l'as eu. A part ça. 
Et savoir ce que c'est l'amour. 
Pauvre petite. 
Pauvre petite fille. 
Pauvre petite fille riche.
Tu pourrais essayer. Tu le fais. Mais c'est trop. Trop nouveau. Trop de sacrifices. Ça ne fonctionne pas. 
Et tu sais au fond de toi, tu sais et tu n'arrives pas à trouver la solution.
Tu seras toujours de ce fait et de ce fait seulement
Tu seras toujours de celles
que l'on quitte.
 

à deux

"Si tu dis à deux, moi je disparais. Je fonds, mais pas comme tu voudrais, je me fonds. Je me dissous et m'évapore. Je ne marche pas comme ça. Tu ne m'auras pas. À deux, c'est sans moi. Un plus un, d'accord, mais pas de résultat, pas d'arithmétique. Pas avec moi. Sans moi, je te dis. Si tu veux faire des sommes, si tu veux faire des maths, trouve-toi une autre. Une sans retenue, sans soustraction, une qui aime les chiffres pairs. Et les paires.
Moi, ça ne marche pas, je veux bien qu'on se voie, mais pas d'addition, pas de toi et moi, pas de nous, surtout pas de nous.
Mais tu n'es pas sérieux, ce n'est pas vraiment ce que tu voulais... Ne me dis pas que tu es comme ça, à faire des calculs rapides, à tout fondre et confondre, à m'ajouter à toi. Il n'y aura jamais le compte. Pas avec moi. Sans moi, oui. Sans moi, tu y trouveras peut-être ton compte. Mais retire ce que tu viens de dire. À deux. Je ferai comme si je ne l'avais pas entendu. Comme si tu n'avais jamais dépassé la ligne. Comme si on s'aimait juste bien. Comme si je n'avais pas à me justifier, comme je le fais, avec des maths, des chiffres et des calculs. Nul. Zéro. Oublie. Un et une, ça ne se mélange pas. Et c'est très bien comme ça. Si tu redis à deux, c'est fini. Moi, je disparais. Et toi..."
Elle ne finit pas sa phrase, se lève et me regarde. Ce n'est pas un sourire, pas une grimace. Elle s'en va, je la perds. Juste parce que j'ai dit ça. Deux mots, cinq lettres et un espace. Je regarde son dos, sa silhouette, son pas précipité. Une de perdue. Combien à retrouver ?