Journal de celui qui est parti – avant le départ
Se réveiller pour le savoir. pour vérifier. Une impression dans son sommeil. La dernière sensation du rêve. Ce rêve qu'on a espéré, attendu et qui cette nuit est venu, comme par surprise. Encore mieux, encore meilleur. Meilleur qu'on l'avait rêvé. Et se souvenir de ce rêve, ce rêve qu'on avait souvent imaginé, pensé. S'en souvenir maintenant qu'il a eu lieu dans son sommeil, s'en souvenir tel qu'il a été et pas tel qu'on l'avait souhaité. Se forcer à se concentrer sur sa réalité. La réalité d'un rêve. Aussi floue voire plus floue que l'idée qu'on s'en était faite. Retrouver ce bonheur immense, pendant le sommeil, maintenant voilé par le réveil, par la conscience que ce n'était qu'un rêve. Retrouver ce bonheur. Dans sa mémoire. Mémoire de ce que l'on a soi-même inventé. Sans s'en rendre vraiment compte, comme si le cerveau nous faisait cadeau pour une fois d'un rêve, du rêve qu'on attendait chaque soir en s'endormant, en sombrant, en s'abîmant dans le sommeil. Ce refuge où cela devient possible. Où ce bonheur inaccessible existe. Où il a existé. Cette nuit. Pour une durée inconnue. Peut-être seulement quelques secondes. Touchées par la grâce. Et qui laissent une sensation d'ivresse, de plénitude. La plénitude de rien. Car en fait, il ne s'est rien passé. On a rêvé. On a pensé sans le vouloir ce qu'on voulait toujours penser. Et ce matin, on est toujours le même qu'hier soir. Ce petit supplément de bonheur en plus. L'éventualité du "ça aurait pu arriver". En vrai. Vraiment. Au moins là c'est arrivé. En rêve. La surprise est la même. L'après aussi. Un état d'apesanteur, un bien-être, une expression involontairement béate dans la pénombre. C'est arrivé. Ça m'est arrivé. Enfin. Tant pis si aujourd'hui me prouve le contraire. J'ai vécu ce que je voulais. J'aurais toujours ce refuge. Dans mes souvenirs. Si la vie prend un autre tour, au moins là – je sais que tu m'attends.
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