meinetwegen

tentative de rattrapage, espace d'exploration, d'échange et d'expérimentation, tout par la langue, rien que la langue, slurp.

24 November 2006

Il reste - première partie


Je suis arrivée vers 23 heures, ai poussé la porte avec mon sac, posé mes clés à droite en entrant. Il n'est pas parti. Je l'ai vu tout de suite à ses mocassins sur le paillasson. J'étais sûre qu'il ne pourrait pas rester. Après ce qu'on s'était dit. Après ce que je lui ai dit. Sur le moment, c'était un peu théâtral, je parlais très fort, j'avais ouvert la porte de l'appartement en lui disant de partir, en le suppliant. Sinon ça va mal se passer. J'avais dit ça comme dans un film. Et puis j'avais refermé la porte parce quand même il était tard, les voisins n'avaient pas à savoir ce qui se passait, ça allait suffisamment jaser de me voir toute seule dans l'immeuble... Fred est resté très calme, comme toujours. Il a dû croire à une nouvelle crise, j'ai vu que jouer les hystériques n'arrangerait rien. J'ai donc changé de ton. Et j'ai tout déballé. Toute cette histoire pour pas grand chose. Plus d'envie, on tourne en rond, tu le dis toi-même qu'on tourne en rond, je te vois soupirer, tu sais, je te vois quand tu me tournes le dos et que tu soupires. On ne va pas tout gâcher juste parce qu’on a un bel appart’ qu’il serait dommage de quitter. C’est ridicule. J’ai pas envie de gâcher les bons souvenirs maintenant.
Tout le temps où je disais ça, il jouait avec sa cigarette, pas pour me provoquer, non, je crois qu’il ne voyait pas que cette fois j’étais sérieuse, que je pensais ce que je disais ou plutôt que j’avais réfléchi avant de le dire. Ce n’était pas une engueulade de plus. C’était fini. J’ai dit ça en pensant avoir l’argument ultime. C’est fini, Fred. Ça ne sert plus à rien. Sinon ça va mal se passer. Il soufflait lentement la fumée en me regardant avec un air inexpressif, plutôt fermé, renfrogné. J’ai explosé. Mais dis quelque chose, toi, tu vois bien qu’on ne se supporte plus, je vois bien que tu ne peux plus me supporter. Ça fait des jours qu’on ne se parle que pour se dire t’as payé le loyer, faut penser à mettre des sous pour la voiture demain, c’est pas ce qu’on voulait, on va pas vivre comme ça toute notre vie. A ce moment-là, dans son regard j’ai vu passer une lueur bizarre, comme un défi, comme s’il me disait, moi ça me dérange pas de vivre comme ça. Du coup, j’ai été méchante, j’ai dit des trucs que je ne pensais même pas pour le faire réagir, pour qu’il se défende, pour qu’il parle. J’ai tout ressorti, les vieux problèmes qu’on avait enterrés, sa mère, le fait que mes amis m’avaient laissée tomber parce qu’ils n’appréciaient pas sa compagnie, je rajoutais les couches successives pour le blesser, pour le voir flancher, pour que lui aussi s’énerve à son tour, qu’il vide son sac, qu’il me dise ce qui ne va pas, depuis tout le temps où ça vivote chez nous. Il a écrasé sa cigarette en agitant légèrement la tête de gauche à droite. Et il a dit je ne vois pas pourquoi je partirais.
Bon, après ça, je pense que les voisins ont eu tout le loisir de comprendre ce qui se passait chez nous, j’ai crié, j’ai crié plus pour lui faire peur, qu’il comprenne enfin que je ne plaisantais pas que c’était vraiment fini, que je voulais qu’il s’en aille. Sinon c’est sûr ça va mal se passer. J’ai dit je pars pour trois jours, quand je rentre je veux ta clé dans la boîte et je ne veux pas te retrouver ici. Ça vaut mieux pour tous les deux… Et là, je rentre et il dort ou doit dormir dans la chambre, tout est éteint. J’hésite à faire un scandale, à le jeter du lit à le mettre dehors à jeter ses affaires par la fenêtre à réveiller toute la montée à appeler les flics pour qu’ils l’emmènent à le rouer de coups jusqu’à ce qu’il.
Je n’ai presque pas dormi du week-end et je n’ai pas la force de lutter ce soir. Je me couche sur le canapé.

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